Dans cette discussion avec ma collègue Caroline Bied, TRA, Thérapeute en relation d’aide®, nous abordons un sujet complexe : comment accueillir plus de douceur dans nos vies et dans nos relations professionnelles.

Une réflexion entamée sur un commentaire LinkedIn qui nous a amenés à explorer des thèmes profonds comme la pitié et la compassion dans un monde de performance.

.

Marche ou crève

engin akyurt sur Unsplash

T’es pas capable d’avancer et d’aller plus haut : tu vaux rien. Je ne suis plus capable d’être dans cette énergie-là. Rien que d’en parler, ça me contracte la poitrine. — Caroline

Quand j’entends Caroline parler de cette injonction qui circule dans les milieux professionnels tout particulièrement, moi aussi ça me fait mal dans le corps.

Dans une société qui valorise le plus souvent la dureté sur soi et la performance, c’est un acte de rébellion de prioriser l’humanité, la bienveillance et l’équilibre.

Et ça vaut la peine, parce que réinstaurer ces valeurs a beaucoup d’impact sur notre quotidien et nos interactions interpersonnelles.

.

Sous-estimée douceur

David Clode sur Unsplash

Pour Caroline qui a grandi en France, la douceur peut être perçue comme une faiblesse.

Je saisis mieux pourquoi c’est si important pour elle de réintroduire la douceur dans nos interactions interpersonnelles et tout particulièrement dans le monde du travail.

Parce que cette qualité de douceur nous aide à mieux connecter avec soi-même et avec les autres.

Sans cette connexion, il est plus facile de glisser dans des dynamiques de pouvoir : supériorisation, domination, exploitation, etc.

.

Revoir le sens de la pitié

Scan the World, Pietà (de Michelangelo) CC BY-SA 4.0

La pitié est un sentiment qui rend sensible aux souffrances, au malheur d’autrui. La pitié peut également se présenter sous la forme d’un mépris apitoyé, voire dédaigneux et hautain. Wikipédia

Le mot « pitié » a deux sens et celui que nous retenons est celui perçu négativement, parce que lié à la supériorisation (pour la personne qui « prend l’autre en pitié ») et à la dévalorisation (pour la personne qui « fait pitié »).

Il y a certainement un jugement moral que nous avons adopté de ce mot : quelque chose de misérable, de pitoyable dans l’idée de faire pitié ou de prendre en pitié.

On peut aussi entrevoir la pitié dans son aspect lumineux : comme première étape d’un processus qui mène à la compassion.

Cette gradation, de la pitié à la sympathie, puis à l’empathie pour terminer avec la compassion, est un modèle précieux pour cultiver le sens positif de la pitié dans nos relations humaines, à commencer par la relation à soi.

.

Ouvrir le cœur

Milarépa, Dharmakaya Center For Wellbeing

Cette prise de conscience, je la tiens du poète Milarépa, une figure du bouddhisme tantrique tibétain, un ermite, un mystique et un poète renommé pour sa grande profondeur.

Dans l’un de ses écrits, il raconte un épisode particulièrement difficile : seul et sans abris au cœur de l’hiver, sous la pluie et la neige, son cœur vacille.

À cet instant, il s’arrête et ressent de la pitié pour lui-même.

Cette pitié, qui pourrait sembler une faiblesse, devient une ouverture. Ce craquement intérieur lui permet de toucher à ses ressources, de retrouver la force de prendre soin de lui, malgré l’adversité.

Ce passage par la vulnérabilité, par cet espace où l’on se permet de ressentir pleinement, est devenu pour moi une clé pour avancer.

Cette conception de la pitié m’ouvre, m’inspire et éclaire quelque chose en moi.

.

Quand la performance tourne au vice

Rostyslav Savchyn sur Unsplash

Quels sont les dangers d’une vie « sans pitié » centrée uniquement sur le faire et la performance ?

Un chemin d’oubli de soi qui en mène plusieurs à l’épuisement.

Cette coutume moderne devenue banale nous mène à une fatigue collective, une aliénation et une perte de sens, un désenchantement qui nourrit le cynisme et le je-m’en-foutisme.

Ça ne peut pas être ça la vie !

Alors comment retrouver un équilibre entre ambition et bien-être ?

.

Reconnecter son humanité

Mathew Schwartz sur Unsplash

S’accorder le droit à l’erreur, reconnaître ses limites et accueillir ses émotions sont des gestes essentiels pour établir ou retrouver un espace de bienveillance envers soi-même.

La vie ne devrait pas être une course sans fin, dictée seulement par des injonctions de dureté et de performance.

Nous pouvons choisir un chemin vers plus d’équilibre, où la douceur et la compassion nous guident.

C’est une voie pour accueillir ce qu’il y a de vrai et de vulnérable.

Toucher à cette sensibilité nous met en contact avec ce qu’il y a de précieux en soi : notre vitalité, nos besoins, nos élans et nos ressources intérieures.

Paradoxalement, ça prend de la solidité et de la force pour accorder de l’attention à cette dimension plus sensible.

Et toi, comment fais-tu de la place pour plus de douceur dans ta vie ?